Bien avant

Bien avant les tubes tordus
Sur le dos des corbeaux
Bien avant les cônes écrasés
Sur le dos des cabillauds
Nous allions nus
Frappant la surface de l'air et de l'eau
Bien avant les poêlons fendus
Sur le dos des chameaux
Bien avant les casseroles fêlées
Sur le dos des escargots
Nous allions nus
Éblouis par la surface de l'air et de l'eau
Bien avant les traquenards tendus
Sur le dos des bonobos
Bien avant les pièges posés
Sur le dos de dodos
Nous allions nus
Perdus à la surface de l'air et de l'eau

Au début

Au début il n'y avait rien
Rien que des oiseaux
Rien que des oiseaux sans plume
Rien que des oiseaux sans bec et sans patte
Au début il n'y avait rien
Rien que des pieds
Rien que des pieds sans ongle
Rien que des pieds sans talon et sans orteil
Au début il n'y avait rien
Rien que des fruits
Rien que des fruits sans pépin
Rien que des fruits sans pulpe et sans écorce
Puis vint le son
Puis vint l'air
Puis vint la terre
Puis vint la douleur
Puis vint le goût
Puis vint le sang

Qui est là ?

De l'autre coté
Qui est là ?
Qui est là ?
Claquant des dents de l'autre coté
Qui est là ?
Qui est là?
Tremblant des mains de l'autre coté
Qui est là ?
Qui est là?
Transpirant des pieds de l'autre coté
Le long Le long 
Le long de ce long couloir
Qui est là ?
Venant de l'autre coté

Qui

Qui donc sur le crane me tape
Des coups de barre de fer
Qui donc derrière la nuque me frappe
Des coups de manche à balai
Qui donc sur les orteils m'écrase
Des coups de talon clouté
Qui donc au creux des reins m’assène
Des coups de crosse de fusil
Qui donc dans le foie me boxe
Des coups de manivelle de cric
Qui donc sur le nez me cogne
Des coups de tuyau en PVC
Comme le cérvidé tapant de ses sabots le sol du sous-bois
Comme le picidae frappant de son bec le tronc de l'arbre mort
Comme l'éléphantidae écrasant de ses pieds les hautes herbes sèches
Comme l'homidé assénant de ses poings la noix de coco tombée
Comme le marsupialia boxant de ses pattes l'air épais du bush
Comme le monodontidae cognant de sa défense le fond sableux de l'océan
Le cerf le pic l'éléphant le chimpanzé le kangourou le narval

Rien

Rien ne s'est passé comme prévu
Dans les endroits isolés
Dans les endroits isolés de la campagne
Rien ne s'est passé
Rien ne s'est passé comme prévu
Dans les endroits isolés de la montagne
Rien ne s'est passé comme prévu
Dans les endroits isolés
Dans les endroits isolés de l'océan
Alors les hiboux rendus fous se cachent dans les hautes cimes
Ils volent par la campagne hululant
Alors les aigles rendus furieux se cachent dans les hauts pics
Ils planent dans la montagne trompetant
Alors les albatros rendus exaltés se cachent dans les hautes crêtes
Ils lévitent sur l'océan piaulant

Du sable

Du sable entre les doigts de pieds
Du sable sous les paupières closes
Du sang dans les trous de nez
Du sang entre les doigts de pieds
Du goudron sous les paupières closes
Du sang dans les trous de nez
Du goudron entre les doigts de pieds
Du sable sous les paupières closes
Du goudron dans les trous de nez
De la fatigue derrière le corps couché
De la fatigue derrière les jambes allongées
De la fatigue derrière les bras écartés
De la fatigue derrière le crane écrasé

Des collines

Des collines des rivières des montagnes
Des montagnes des rivières des tunnels
Des rivières des collines des ponts
Des tunnels des forêts des ponts
Des falaises des ponts des tunnels
Des collines des portails des forêts
Des murs des rivières des montagnes
Des murs des collines des brouillards
Des portails des clôtures des tunnels
Des brouillards des portails des champs
Des forêt des trottoirs des murs
Des grues des trottoirs des ponts
Des tunnels des haies des falaises
Des portails des champs des panneaux
Des champs des grues des averses
Des averses des vents des collines
Des vents des averses des rayons
Des panneaux des barrières des rayons